Statut de l’ILM
L’Institut Louis Malardé (ILM) est un établissement public à caractère industriel et commercial, placé sous la tutelle du ministre de la Santé du gouvernement de la Polynésie française.
Il porte le nom du Dr Louis MALARDÉ, médecin polynésien nommé directeur de l’Institut en 1967 et emporté par une maladie la même année.
Il est régi par la délibération n° 2000-114 APF du 28 septembre 2000 et l’arrêté n° 1834 CM du 29 décembre 2000 qui précise les règles de son fonctionnement.
L’ILM exerce une activité d’analyses, de recherche et de négoce dans les domaines de la santé, de l’environnement, de l’hygiène et de l’alimentation.
Son statut lui confie les missions suivantes :
- il exécute, dans le domaine biomédical, des programmes de recherche définis en relation avec la politique générale de santé décidée par le gouvernement de la Polynésie française ou sur commande de ce dernier ;
- il peut également entreprendre des recherches concourant à la protection de l’environnement et à la valorisation du patrimoine naturel de la Polynésie française, dans la perspective du développement durable de son économie ;
- il a vocation à participer aux actions de prévention, de diagnostic et de traitement des maladies et à prendre part, à ce titre, à la veille sanitaire en matière d’hygiène et de salubrité publique et de lutte contre les maladies, notamment par la réalisation d’analyses des eaux et des aliments, aux campagnes de prévention sanitaire et d’information ou d’éducation du public, à la réalisation d’enquêtes, tests et analyses dans ces domaines ;
- il réalise, pour le compte de la direction de la santé, les examens de biologie médicale, à l’exception des analyses réalisées par les laboratoires de la direction de la santé et celles réalisées dans le cadre de l’urgence ;
- il réalise, pour le compte de la direction de la santé et du centre hospitalier de la Polynésie française, les analyses de biologie médicale relatives au diagnostic, hors tests de diagnostic rapide, et au suivi de la dengue, du Zika, du chikungunya, ainsi que de tout nouvel agent infectieux à l’origine d’une alerte sanitaire ;
- il peut également réaliser des examens de biologie médicale pour le compte des établissements privés de soins ou sur ordonnances des praticiens libéraux ;
- il participe à la formation des personnels de la recherche et des agents du service public de la santé ;
- il peut procéder à l’acquisition et à la vente de sérums, vaccins et autres produits ou accessoires nécessaires à la prévention et au traitement d’affections menaçant la santé.
Quelques chiffres
Rapports d’activité
Histoire
L’Institut Louis Malardé : une existence ancrée dans l’histoire de la Polynésie française.
Une initiative philanthropique relayée par la puissance publique
En 1945, alors qu’il s’installe à Tahiti, William Albert ROBINSON, écrivain, navigateur et ingénieur naval américain, ému par les ravages causés par la filariose lymphatique, décide de créer un centre de recherche sur la filariose à Tahiti.
Son ami, Cornélius CRANE, lui offre son aide financière. Le projet gagne en ampleur.
Pendant 2 ans, W.A. ROBINSON multiplie les contacts avec d’éminents spécialistes américains et français, ainsi qu’avec les autorités locales. Des accords de collaboration sont noués avec le Service de santé des Etablissements français de l’Océanie (EFO) et l’Université de Californie du Sud.
De nombreuses personnalités locales soutiennent son initiative. Une association anti-filarienne est créée.
Une enquête de terrain montre l’importance de l’endémie : 82% des foyers sont touchés par la filariose, 40% des Polynésiens sont porteurs de microfilaires et 8% souffrent d’éléphantiasis. « Ces chiffres sont simplement effrayants. Il ne s’agit ni d’une endémie, ni même d’une hyperendémie. Nous sommes plongés dans un véritable bain de filariose. », dira le Pr GAILLARD de la Faculté de médecine de Paris, devant les représentants de l’Assemblée territoriale.
Le laboratoire Lederlé fait don d’un stock de Notézine pour un premier essai thérapeutique de masse. Les résultats sont spectaculaires : en quelques mois seulement, on observe 90% de négativation de la microfilarémie.
Au mois d’octobre 1948, l’Institut de recherche médicale des EFO, déjà appelé Maison de la filariose (Fare Mariri en tahitien) ouvre ses portes dans l’enthousiasme général. Il sera officiellement créé l’année suivante.
L’actuel bâtiment sera inauguré le 9 septembre 1950.
Un rôle croissant au service de la santé publique
Un service de soins est mis en place pour apporter soulagement aux filariens les plus sévèrement touchés. Dans le même temps, les effets conjugués de la lutte anti-vectorielle, des dépistages sur le terrain par les taote mariri et de la distribution de Notézine font rapidement reculer la maladie.
En 10 ans, la prévalence moyenne de porteurs de microfilaires chute de 40% à 7%, le taux d’éléphantiasis de 8 à 1,2% et le taux d’infestation des moustiques vecteurs passe de 7,4% à 0,6%.
Au fil des ans, l’Institut se tourne vers d’autres activités de santé publique.
Un laboratoire d’analyses de biologie médicale au profit de la santé publique est créé et l’Institut se voit confier le service d’hygiène des districts et des îles puis le centre de lutte contre la tuberculose.
A sa tête, plusieurs médecins se succèdent pour poursuivre l’action de William ROBINSON.
En 1967, le Dr Louis MALARDE, jeune médecin polynésien, est nommé directeur de l’établissement. Quelques mois plus tard, il est malheureusement emporté par une maladie. En hommage à ses compétences et son dévouement pour la santé des Polynésiens, son nom est donné à l’Institut.
Alors que des interrogations pèsent sur la destinée de l’établissement, hésitant entre un avenir consacré à la recherche scientifique ou à la santé publique, la recherche s’impose peu à peu.
Le service d’Etat des endémies qui assure des consultations spécialisées (dengue, filariose, tuberculose, lèpre, infections sexuellement transmissibles) succède au service d’hygiène des districts devenu autonome.
Une flambée de ciguatéra à Bora Bora conduit à la création, en 1967, du laboratoire d’océanographie médicale, aujourd’hui laboratoire de recherche sur les biotoxines marines.
Un insectarium dédié à l’étude des insectes vecteurs et à la lutte anti-vectorielle s’installe à Paea.
L’émergence d’un pôle de recherche
En 1971, le laboratoire d’analyses de biologie médicale est transféré vers le centre hospitalier cédant la place à des laboratoires de recherche.
Les liens avec l’Université de Californie du Sud se dénouent mais l’Institut s’ouvre aux collaborations nationales et internationales :
- accord de collaboration avec l’ORSTOM (aujourd’hui Institut de recherche pour le développement – IRD) pour l’étude des insectes vecteurs. Cette collaboration sera par la suite étendue à l’étude de la ciguatéra ;
- accord de collaboration avec l’Université de Tohoku (Japon) qui aboutira notamment à la découverte de la micro-algue responsable de la ciguatéra ;
- convention de coopération scientifique avec l’Institut Pasteur concernant des projets d’études en parasitologie et virologie.
En 1977, la disparition du service d’Etat des endémies marque un tournant dans l’avenir de l’Institut. La vocation de recherche biomédicale de l’établissement est affirmée, mais sa mission de santé publique préservée.
Un service clinique poursuivra consultations spécialisées et enquêtes épidémiologiques jusqu’en 2009.
Un centre de distribution biomédicale (1981) ouvre ses portes, suivi d’un nouveau laboratoire d’analyses médicales qui rend accessibles les examens biologiques à l’ensemble des formations sanitaires des archipels (1982).
En 1984, sont créés les laboratoires de recherche en immunologie et parasitologie (filariose, lèpre et tuberculose), en virologie (dengue) et en entomologie médicale (lutte anti-vectorielle).
En 1990, l’ILM intègre le réseau international des Instituts Pasteur et noue, en parallèle des collaborations avec de nombreuses équipes étrangères (Université de Kyoto, Northampton College…).
Le périmètre des recherches s’étend encore avec l’ouverture, en 1991, du laboratoire des substances naturelles destiné à valoriser le patrimoine naturel polynésien et promouvoir la médecine traditionnelle. Cette activité perdurera jusqu’en 2012.
Une évolution récente, miroir d’une Polynésie en mutation
En 1984, l’ILM quitte la tutelle de l’Etat pour celle de la Polynésie française et devient un établissement public administratif du Territoire. Une nouvelle stratégie de développement est déployée par le gouvernement afin de cibler les besoins spécifiques du Pays. Cette stratégie, inspirée du système en vigueur au sein du réseau des Institut Pasteur, associe laboratoires de recherche et laboratoires d’analyses de biologie médicale et fait de l’Institut un observatoire unique de la santé des Polynésiens.
Après 20 ans d’association, en 2000, l’Institut Pasteur rompt les liens avec l’Institut. L’Assemblée de la Polynésie française confère à l’ILM le statut d’établissement public à caractère industriel et commercial et partage ses missions entre activités de santé publique et de recherche.
Ces missions continuent de se multiplier.
En 2000, un laboratoire d’analyses des eaux et des aliments est créé dans l’objectif de doter la Polynésie d’un laboratoire de référence en matière environnementale et alimentaire et favoriser l’export de poisson. Dès sa création, ce laboratoire s’engage dans une démarche qualité. Devenu le laboratoire d’analyses en hygiène/biosécurité/environnement, il est depuis 2004, il est accrédité par le comité français d’accréditation.
En 2009, une unité de recherche sur les maladies non transmissibles est constituée afin d’étudier l’origine, la nature et l’évolution, en Polynésie, des maladies dites « de civilisation » (obésité, maladies liées à l’environnement…), et contribuer à poser les bases d’une politique de prévention vis-à-vis de ces pathologies dont l’impact est croissant.
En parallèle, les liens entre les laboratoires de parasitologie, virologie, entomologie et le laboratoire d’analyses de biologie médicale se resserrent pour renforcer la recherche sur les pathologies infectieuses endémiques (dengue, tuberculose, leptospirose…) et émergentes (Zika, chikungunya…), ainsi que la lutte contre leurs vecteurs et la veille sanitaire en Polynésie et dans le bassin Pacifique. Cette activité s’appuie notamment sur le laboratoire de haute sécurité biologique (NSB3) dont le Pays a doté l’ILM, en 2016, en lui confiant la responsabilité du diagnostic et du suivi des pathogènes à risque épidémique.
Fort de son histoire, d’un vaste réseau de collaborateurs à travers le monde et d’une dynamique d’adaptation aux problématiques locales, l’ILM constitue un maillon essentiel du système de santé polynésien.